Art construit, unicité, multiplicité

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Fortes de leur passion pour l’Art Construit, les galeries Zemma et Art Dialogue se sont unies pour exposition intitulée « L’ Art Construit, unicité, multiplicité», qui donne une visibilité inédite à Marseille aux artistes de cette tendance.

Dans un lieu d’art contemporain (un gymnase réhabilité), elles proposent un événement d’envergure en réunissant 20 artistes de nationalités différentes, soit pas moins de 90 œuvres. L’exposition se déroulera sur deux mois et en deux temps, de façon à proposer à chaque fois un dialogue entre deux générations, en confrontant les figures historiques de ce mouvement comme Vera Molnár, François Morellet, Victor Vasarely, Julio Le Parc, Carlos Cruz Diez, et Aurelie Nemours, à ceux qui ont perpétué leur héritage avec talent et innovation.

Domitille d’Orgeval

Historienne d’art

Entre les commissaires d'exposition Ginette TURPEAU PARRES (Galerie Art Dialogue) et Marc RAGOILLIAUX (Galerie Zemma) les artistes, de gauche à droite : Félix LAZO VARAS, Jocelyne SANTOS, Vincent PROUST, Izabela KOWALCZYK, Cristina GHETTI et Michelle LACROIX

L’unicité affirmée d’un langage formel

On peut repérer la rupture introduite par le mouvement de l’art construit dès le début du XXe siècle, en écho à la suprématie industrielle et ses révolutions scientifiques au sein de la modernité. Ce mouvement privilégie alors l’épure d’un langage formel, de géométrie plane ou dans l’espace, employant la couleur et son potentiel cinétique.

Ces artistes revendiquent une plus grande autonomie et composent de nombreux groupes plasticiens d’avant-gardes diffusant leurs conceptions aux domaines de l’art et de la société, par les arts appliqués, la typographie, l'architecture, le cinéma et le design. Ils, elles, cherchent à propager l’art à la vie et dans la cité. Citons, pour repères, depuis le suprématisme (1915) et le mouvement De Stijl (1917), le manifeste Concret (1930), Cercle et Carré (1930), Abstraction Création (1931), Réalités Nouvelles (1946), Madi (1946), le Groupe Espace (1951), le GRAV, le groupe Zéro et l’Opto-cinétique dans les années 1960 et plus récemment, le second Manifeste Concret (1993).

Les valeurs du multiple

Tout au long du XXe siècle ce courant de l’art moderne initié en Europe s’est transmis, avant et après la Seconde Guerre mondiale, sur les continents asiatiques, spécifiquement au Japon et en Amérique.

Dans cette internationalisation, diverses écoles se sont formées, affirmant des valeurs éducatives, ludiques et une volonté de rendre l’art socialement plus accessible. L’affirmation d’une primauté de l’œuvre sur l’artiste s’est manifestée également dans la reconnaissance d’un plus grand nombre de femmes artistes au sein de ce mouvement.

Cette diversité trouve également son sens dans la promotion des œuvres par la pratique de l’estampe et du multiple à des prix plus modiques, ce qui contribue à faire de ce courant un art populaire, voire accessible. Vasarely en fut un des grands exemples dans les années 1960 et 70, grâce auquel l’abstraction géométrique et cinétique s’est amplement diffusée dans toute la société.

Aujourd’hui, ce vaste mouvement s’est transmis sous d’autres dynamiques, présentes dans le minimalisme ou encore dans l’art numérique tout en se prolongeant dans la pratique de nombreux artistes poursuivant le mouvement de l’art construit et de ses déclinaisons au niveau international.

Par la modeste initiative de nos deux galeries, notre but est de diffuser les valeurs qui animent les courants de l’art construit dans la cité et font vivre la diversité des artistes qui s’en considèrent les porteurs contemporains.

Marc Ragouilliaux